La première des conditions afin d'être capable de guider les autres est
de faire preuve de bonté et de toujours considérer les autres comme
supérieurs à soi-même. La deuxième condition est de ne pas être
égocentrique, de ne pas chercher son propre intérêt, et de ne pas être
hypocrite: en résumé de mettre en pratique ce que l'on prêche. La
troisième condition est de ne pas être un voile entre le disciple et
Dieu, autrement dit d'appeler les gens à Dieu et non pas à soi.
L'histoire suivante extraite du Tadhkirat al-awliya (mémorial des
saintes) de Attar nous permet d'illustrer ce point. Le maître soufi Abû
Uthman Hiri a dit un jour à un autre maître soufi, Abû Hafs Haddad: "Je
suis devenu tellement illuminé que je donne maintenant des cours de
sagesse divine".
"Comment en êtes vous arrivé-là ?" lui répondit l'autre maître.
"La bonté envers les autres", répondit-il.
"Et jusqu'où va votre bonté envers les autres ?", répliqua Abû Hafs.
"Jusqu'au
point où", répondit-il, "si Dieu me mettait en enfer afin de purger les
péchés de tous les hommes, je trouverai cela tout à fait acceptable".
"Dans
ce cas", dit son compagnon, "je vous rends grâce! Cependant, lorsque
vous prenez la parole dans les réunions, soyez attentif avant tout à
votre cœur et à votre corps. De plus, prenez soin de ne pas laisser la
foule vous rendre arrogant, car ils ne voient que votre aspect extérieur
alors que Dieu seul voit l'intérieur".
Abû Uthman monta ensuite en
chaire pour donner son discours, alors que Abû Hafs se cacha dans un
coin afin de l'observer. Lorsque enfin la réunion se termina, un
vagabond passa par là et demanda si quelqu'un pouvait lui donner une
chemise pour se couvrir. Sans hésiter, Abû Uthman enleva sa chemise et
la lui donna.
"Menteur!" cria Abû Hafs de l'endroit où il se tenait. "Descendez de cette chaire!"
"Quel mensonge ais-je dit ?" implora Abû Uthman.
"Vous
avez prétendu", répliqua l'autre maître, "que votre bonté envers les
autres était plus grande que celle envers vous-même. Cependant, vous
voila maintenant à exceller(1) dans la générosité afin de gagner les
mérites des 'excellents', vous considérant comme meilleur et ayant plus
de valeur que les autres. Si vous aviez été vraiment honnête vous auriez
attendu pour laisser sa chance à un autre. Ainsi donc vous êtes un
menteur et il n'y pas de place à la chaire pour les menteurs!"
Dr. Nurbakhsh
journalsoufi.com
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