Dépression et Eveil.


Dépression et éveil ! Ces deux termes ont été plus d’une fois associés, dans l’histoire de la spiritualité ; les exemples les plus célèbres étant sans doute ceux de Job et de Bouddha, ou encore de Judas qui, comme on le sait, finit par se suicider. En fait, peut-être pourrait-on considérer l’éveil comme une dépression, mais... sans la dépression. Dans l’éveil, au moment même où tombent toutes les illusions qui excitaient habituellement notre mental et le faisait courir après les objets de satisfaction, il ne reste évidemment plus trace de la moindre émotion, du moindre désir, du moindre projet. Et la paix parfaite qui accompagne cet état n’est d’ailleurs rien d’autre que l’absence des conflits ordinairement suscités par les désirs.
Or, s’il existe un autre état dans lequel on retrouve apparemment une absence de désirs et de projets, c’est bien la dépression ! Naturellement, la comparaison s’arrête là, et, au-delà des apparences, une différence essentielle semble, en revanche, devoir être relevée : dans la dépression l’absence de désir n’est pas absolue. Si, dépressifs, il ne nous reste parfois guère plus qu’un désir instinctif et inconscient de sortir du marasme (ce qui constitue quand même un désir), la plupart du temps c’est l’espoir bien conscient d’un retour de flamme de nos anciennes illusions que nous passons notre temps à cultiver, ne désirant secrètement rien d’autre que de retrouver les plaisirs d’une existence superficielle, insouciante et animale. En deux mots, dans la dépression nous nous plaignons d’avoir perdu nos illusions, et nous désirons encore le désir.. ce qui n’est évidemment pas le cas dans l’état d’éveil.

Pour cette raison sans doute pourrait-on considérer la dépression comme un éveil raté. Raté, parce que, bien que privé de désirs concrets, le mental continue malgré tout de s’orienter vers l’extériorité et ne veut pas s’échapper du temps. Les désirs n’ont plus assez d’énergie pour déclencher le passage à l’acte, mais ils en ont encore suffisamment pour entretenir, et même stimuler, le décalage pathologique de l’ego par rapport au présent... car, plus qu’aucun autre, le dépressif est tout entier dans son passé.

buddhaline.net



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